Winnipeg – Prison de la rue Vaughan
La prison de la rue Vaughan, qui hébergeait autrefois certains des criminels les plus notoires du Manitoba, est aujourd’hui pratiquement inoccupée. Quand le bâtiment a été inauguré en 1881, il était connu sous le nom de Prison du district judiciaire de l’Est et constituait, à bien des égards, une amélioration par rapport à la prison provinciale utilisée auparavant.
La lugubre ancienne prison de la rue Main, en effet, était dotée de cellules exiguës et a été décrite par le Manitoba Free Press comme un cachot humide, sombre et lugubre qui empestait jusqu’au ciel. La prison de la rue Vaughan se démarque à la fois de cette ancienne prison et d’autres exemples d’architecture carcérale.
L’architecture classique des prisons était sombre et morne, mais l’architecte anglais Walter Chesterton s’en est éloigné dans sa conception de celle de la rue Vaughan. Inspiré du style des églises de la Renaissance italienne, le bâtiment devait présenter un aspect inquiétant et peu attrayant afin de dissuader les criminels. La prison de trois étages, construite en briques couleur chamois avec une bordure en pierre calcaire, a coûté un peu plus de 61 000 $.
Les différentes ailes servaient à séparer les divers types de criminels détenus dans la prison. Les délinquants de moindre importance, comprenant souvent des femmes et des enfants, étaient détenus dans l’aile est. Les délinquants masculins aux délits plus graves étaient gardés dans l’aile ouest. Les pires contrevenants, notamment ceux qui étaient atteints de problèmes de santé mentale, étaient maintenus en isolement au sous-sol. Les installations de la prison – cuisine, buanderie, hôpital – se trouvaient dans l’aile sud, tandis que le directeur de la prison et sa famille habitaient l’aile nord.
Dix ans après l’ouverture du bâtiment, des problèmes structurels ont commencé à apparaître. L’architecte Samuel Hooper a été embauché en 1909 pour entreprendre une série de rénovations, dont l’agrandissement de l’aile sud, la suppression de l’ornementation extérieure et l’ajout d’une coupole à trois étages surmontée d’une girouette.
De nombreux Manitobains éminents sont passés par la prison de la rue Vaughan. Helen Armstrong et John Queen, membres du comité de la grève générale de Winnipeg, ont tous deux passé du temps en prison en raison de leur participation à la grève de 1919. Margaret Scott, la première infirmière de santé publique de Winnipeg, a passé du temps dans la prison à s’occuper de patientes malades et mourantes. Il faut aussi mentionner Thomas Mayne Daly, dont la compassion pour les enfants condamnés a conduit à la création du premier système de cours juvéniles au Canada.
Au moment de sa construction, la prison de la rue Vaughan se trouvait aux abords de Winnipeg, mais elle attirait tout de même l’attention de la population locale, qui passait par là pour observer les détenus ou, plus rarement, pour assister à une exécution. On comptera 13 pendaisons à la prison au cours de ses 53 années d’activités. En 1934, la prison provinciale a déménagé à Headingley, et la prison de la rue Vaughan a été transformée en centre de détention pour mineurs jusqu’en 1985, date de sa fermeture.
Des inquiétudes quant à l’avenir du bâtiment ont subsisté jusqu’en 2004, lorsque Heritage Winnipeg et les parties prenantes concernées ont formé le groupe Friends of Vaughan Street Jail afin de promouvoir la préservation du bâtiment.
Aujourd’hui, celui-ci est sous-utilisé et ne sert que d’installation d’entretien pour le gouvernement provincial. La prison n’est ouverte au public qu’une fin de semaine par année, à l’occasion de l’événement annuel Portes ouvertes Winnipeg de Heritage Winnipeg, au cours duquel des milliers de personnes se présentent pour avoir la chance de visiter la prison abandonnée. Hanté selon de nombreuses rumeurs, le bâtiment est le cadre de présentations théâtrales organisées par les bénévoles du groupe Friends of Vaughan Street Jail, racontant les histoires de certains des esprits qui rôderaient dans la prison.
Le groupe tente toujours de protéger la prison de la rue Vaughan, et a l’espoir que le Manitoba s’engage à réhabiliter le bâtiment et à permettre aux cellules historiques d’être transformées en un musée du système judiciaire.